samedi 30 juillet 2011

Stop. Stop!

Je voulais visiter le village historique acadien, situé à Caraquet, dans la péninsule acadienne du Nouveau Brunswick. Les pouvoirs publics ne semblent pas encourager les visites : les transports publics sont absolument inexistants et aucune navette ne circule entre le village historique et la ville la plus proche, Bathurst. Et, c'est un comble, la compagnie de bus "Acadian Bus" ne circule même pas en péninsule acadienne.

J'ai donc pris un billet de bus pour Bathurst. Il me restait à trouver comment effectuer les 45 minutes de route supplémentaires pour atteindre Caraquet. Le stop devrait être facile m'avait-on dit. A la sortie du bus, j'ai trouvé une voiture qui m'a déposé sur une route à destination de Caraquet. La destination était la bonne, mais le lieu peut-être pas idéal. Me voilà sur le bas-côté d'une voie rapide, où les voitures roulant à 100 km/h ne veulent certainement pas prendre le risque de s'arrêter.

Après trente minutes de marche sous un soleil de plomb, voyant passer de grosses voitures presque vides, je commence à désespérer. Soudain, une voiture s'arrête. Je lis : "Agent de conservation du Nouveau-Brunswick". Mince alors, me voilà bon pour une amende? Pas du tout.
- Tu vas où?, me dit le chauffeur avec son accent acadien.
- Caraquet.
- Ok, monte.
Me voilà embarqué avec Claude, responsable de la zone Tracadie-Sheila/Bathurst. Il m'explique que "sa job" consiste à faire respecter la loi sur la nature. Il vérifie entre autres les permis de chasse. Un "blanc" doit en posséder un pour être autorisé à transporter une bête morte. Un "indien" peut en revanche transporter quatre ou cinq orignaux sans être inquiété. C'est un des avantages accordés aux autochtones. Mais c'est la porte ouverte au braconnage et à la revente illégale. Les "peuples premiers , qu'on dit maintenant" revendent sous le manteau pour se faire de l'argent de poche afin d'acheter de l'alcool et de la drogue, m'explique Claude.
J'ai également eu droit au chapitre de la guerre anglais/français qui semble être encore très présente. Il m'explique qu'il refuse de répondre aux mails adressés en anglais. Le Nouveau-Brunswick est la seule province officiellement bilingue. Cela signifie que tous les services publics (provinciaux inclus) doivent être offerts dans les deux langues. Il le sait bien.
La voiture est truffée d'électronique. Ils étaient 13 agents il y a 10 ans. Ils ne sont plus que 4 aujourd'hui pour couvrir la même zone. Pour Claude, son nouvel ami informatique est en partie responsable. La vie semble dure par ici. Les emplois disparaissent, les gens s'appauvrissent, les jeunes migrent vers les villes. Pour les inciter à revenir y vivre, la Province promet de rembourser la moitié de leur prêt étudiant.

Après 35 minutes de route, mon chauffeur me dépose à un carrefour et part dans le sens opposé. "Te voilà à 7 kilomètres de Caraquet". Merci Claude!
Finalement, ma première expérience de stop s'est bien passée. Alors je tend à nouveau mon pouce. Je ne dois laisser passer qu'une dizaine de voitures avant qu'une autre s'arrête. Trois jeunes m'invitent à monter dans leur "char".

Je m'assois à l'arrière, à côté d'un certain David. J'ai oublié les noms des deux autres. Ils ont 19 ans. Le passager avant ouvre une fiole de rhum et la tend au conducteur qui en siffle quelques gorgées puis appuie sur l'accélérateur et pousse la musique à fond. Nous voilà à 120 km/h sur une route limitée à 50 km/h. Il double sur une ligne blanche, dépasse à droite sur la banquette, slalome, klaxonne… Je ne savais plus très bien si j'étais dans une voiture ou dans un wagon de grand-huit. On parle un peu, tous semblent défoncés, ou bourrés, ou les deux. Le trajet semble sans fin. Ce ne sont pourtant que quelques kilomètres. D'un coup, on ralentit. "Il y a des flics dans le coin". Effectivement, nous dépassons un poste de police.

La voiture de l'enfer s'arrête un peu plus loin devant une station service Petro-Canada. "On te débarque ici?". Je salue tout de même mes compagnons avant de sortir, rassuré et heureux d'être toujours en vie. Je rappelle au chauffeur que j'ai ma valise dans le coffre. Il l'ouvre depuis son siège et je me dirige donc vers l'arrière. Je sens tout de même quelque chose de bizarre. Je laisse ma portière ouverte en me disant que cela le retiendra de partir. Naïf. Je n'ai pas le temps de poser la main sur mon sac que la voiture détale. Porte et coffre se ferment avec l'accélération. J'ai d'abord pensé qu'ils voulaient faire une blague. Une blague de gamin. Une blague très conne. Une blague qui n'est plus drôle!
Ils ne reviennent pas.

J'appelle Cédric, mon hôte à Caraquet, et lui explique la situation. Il me conduit au poste de police que j'avais aperçu afin d'effectuer un signalement. En voilà une situation bizarre pour un premier contact!

Nous apprenons le jour suivant que les gamins auraient déposé la valise devant un commerce quelques 500 mètres plus loin. Elle n'y est plus.

Je repars de Caraquet le jour d'après, le bagage léger.

mercredi 27 juillet 2011

Panaché d'accents acadiens

J'ai passé la journée au "Pays de la Sagouine", au Nouveau-Brunswick. Ce parc à thème met en scène des personnages fictifs acadiens. Les scènettes et les musiques racontent avec humour et beaucoup d'entrain (même si elle n'est pas toujours joyeuse) l'histoire de l'Acadie.
J'ai approché une actrice, dont le nom de scène est Mathilda, pour lui demander de me (re)faire une démonstration d'accents. Voici donc quelques exemples du français que l'on peut entendre en Acadie du New-Brunswick, de Nouvelle-Ecosse et du Québec.
D'un village à l'autre, l'accent diffère. Mais la langue reste proche de celle parlée par les ancêtres immigrés il y a près de 400 ans, plus ou moins influencée par l'anglais. Certains accents se retrouvent également encore dans les campagnes françaises; ma grand-mère parle comme les acadiens de Meteghan! :-)



Les villes en question sont séparées par plusieurs centaines de kilomètres. Jetez un oeil sur la carte ci-dessous pour vous en rendre compte. Cliquez sur les points bleus pour retrouver le nom des villes.

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dimanche 24 juillet 2011

Road trip en Nouvelle-Écosse

Voyager au Canada sans voiture, c'est un peu mission impossible. J'ai donc loué une voiture à Halifax. Ma route : le tour de la Nouvelle-Ecosse.


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Je n'étais pas vraiment d'humeur à voyager seul. J'ai passé quelques annonces et trouvé des compagnons de route : deux jeunes allemandes.

Le temps n'était pas de la partie. Brume, pluie, températures basses (jusqu'à 10 degrés…). Mais cela donne au paysage un joli cachet mélancolique. Nous avons suivi la côte Est vers le Nord jusqu'au Cap Breton pour emprunter le fameux Cabot Trail, du nom de l'explorateur John Cabot, arrivé sur ces terres à la fin du XVe siècle.
Le paysage du Nord de la Nouvelle Ecosse fait un peu penser à la Bretagne, mais en plus grand : sa mer, ses roches déchirées, sa verdure… et sa brume évidemment. On avait prévu de pique-niquer le premier jour. C'est bien ce qu'on a fait, au bord de l'eau et sous la pluie.

J'aime bien conduire sur ces routes qui semblent mener nulle part. "Fin de la route à 500 mètres" indique un panneau. Oh, alors ça est, nous y sommes? Mais où? Trente minutes d'attente et "nulle part" se transforme en de l'autre côté de la rive. Il nous a simplement fallu prendre un bac pour continuer.
Les gens ici sont adorables. Une des deux allemandes, Sandra, a oublié son sac sur le bateau. Retour donc au point de débarquement! Mais le bac était déjà reparti. Le passeur a gentiment fait un aller-retour simplement pour nous rendre le sac! Il s'appelle Miles. Allez, devinez son surnom…. c'est "kilomètre". Drôle non? Il fait des "shifts" de 12 heures, de 8 heures le matin à 8 heures le soir. Je ne sais pas si je vais rester travailler au Canada finalement… :-)

Nous avons continué notre route jusqu'à St Peters où nous avons passé la nuit dans la voiture. Nous avons plutôt bien choisi notre spot, nous étions entourés de lucioles, je n'en avais jamais vu autant! C'était vraiment comme dans un dessin animé, des centaines de petits points lumineux virevoltaient autour de nous, c'était magique!
La voiture n'était pas bien confortable. Heureusement, cela n'a pas été toujours le cas. Nous avons également expérimenté un mini-chalet sur le bord de la falaise de Meat Cove. J'aime ces maisons en bois, c'est agréable et ça tient chaud. Ah oui, c'est l'été mais il fait 16 degrés ici. En pleine journée.
Le restaurant du camping nous a servi des spécialités bien évidemment accompagnées de "french fries". On pouvait entendre le gras de la friture depuis la salle du restaurant. On aurait pu le confondre avec un jaccuzzi quand le cuisto a jeté les frites dans l'huile. Il m'a fallu quelques heures pour mon corps assimile cette surdose. D'autant que mon médecin m'a recommandé de limiter mes apports en matières grasses…

C'est assez étrange la manière dont les canadiens s'essaient à valoriser leur histoire. J'ai parfois l'impression qu'ils ont honte de ne pas avoir de villes âgées de plus de quatre siècles. Alors tout détail est transformée en une "grande page de l'histoire du Canada", comme le site de l'antenne de Marconi, à Glace Bay. Certes il a eu un rôle important dans l'histoire des télécommunications sans fil mondiales mais le site en tant que tel a un intérêt assez limité…
A Louisbourg néanmoins, nous avons visité une intéressante reconstitution du village fortifié mettant en scène le mode de vie des français installés ici dans la première moitié du XVIIIe siècle.

De village en village, nous avons pu goûter à la culture de la Nouvelle-Ecosse. En passant au Gaelic College of Celtic Arts and Culture, j'ai acheté un CD de musique gaélique, histoire de se mettre dans l'ambiance sur la route. A Chéticamp, nous avons diné "acadien" et assisté à un Ceilidh, sorte de rassemblant populaire de musique et de danse irlandaise. Et cela a continué le soir même, chez notre hôte, Peter, à Margaree. Nous l'avons rencontré dans un marché de producteurs locaux. Il nous a gentiment convié à une fête chez lui et à rester dormir. Nous y avons retrouvé les deux musiciennes de l'après-midi et un autre couchsurfer, Lewis, joueur de fiddle (violon folk). Une dizaine de personnes dansaient dans la cuisine, c'était surréaliste mais excellent!

De la musique, nous avons pu également en écouter sur la côte sud, à Clare, zone francophone acadienne. En tant que français, cela m'intéressait de découvrir la francophonie de Nouvelle Ecosse. Nous nous sommes arrêtés devant la seule salle culturelle de la French shore, histoire de vérifier le programme. Par chance, plusieurs dizaines de personnes faisaient la queue. Cool, il se passe quelque chose! Je vais prendre des renseignements. On m'invite carrément à assister à ce concert, réservé normalement aux étudiants étrangers en immersion francophone de l'Université Ste Anne, située juste à côté. Super! Nous avons pu voir le groupe "Grand dérangement", très réputé dans la région. Leur nom fait référence à l'expulsion des acadiens de Nouvelle Ecosse par les forces britanniques en 1755. Fiddle, guitare, basse, batterie et danse podorythmique composent ce groupe de musique acadienne celtique folk. J'ai adoré!

Dans le Sud, nous nous sommes bien évidemment rendus à Peggy's Cove, dont le phare apparait sur toutes les cartes postales de la province. Lunenburg est une petite ville portuaire dont l'architecture est classée au Patrimoine mondial de l'Unesco. A Canning, nous avons été hébergé par un professeur de littérature américaine. Il a pris le temps de nous faire visiter la région, en particulier les plus hautes marées du monde (Halls Harbor, dans la baie de Fundy) et les falaises de glaise rouge du Parc national de Blomidon. Retour à Halifax le vendredi 22 juillet.

Au total, nous aurons parcouru près de 2300 kilomètres en Nouvelle Ecosse. Un voyage un peu fatigant, mais un plaisir des yeux agrémenté de belles rencontres!

dimanche 17 juillet 2011

Party de cuisine à Margaree



Les producteurs locaux (peu nombreux) installent leur marché chaque fin de semaine dans un village différent de la région. Ce samedi-là, c'était à Chéticamp, un petit village acadien sur la côte ouest du Cap Breton (Nouvelle Ecosse). J'y suis allé faire un tour et j'y ai rencontré un jeune agriculteur, Peter, ainsi qu'une amie à lui, Nathalie. Au fil de la discussion, ils nous invitent (mes deux compagnons de voyage et moi) à participer à une fête chez lui à Margaree, à quelques kilomètres de là. Il nous propose également de nous héberger pour la nuit. Bien volontiers! Nous serons de la partie!

Nous achetons quelques gâteaux faits maison à une vieille dame à l'accent acadien fort prononcé, puis continuons notre tour du village : un golf, une église, la mer…
La température est basse. Sur les conseils de Nathalie, nous allons fouiller les fripes du sous-sol de l'église. C'est un endroit insolite pour une friperie! Mais bien utile et peu dispendieux. On peut y trouver des manteaux pour 50 centimes.

Nous sommes ensuite allés dans un bar-restaurant local, fameux pour ses après-midi folk. Les soeurs Cassie et Maggie MacDonald s'y produisent ce jour-là. Un fiddle, un piano : voilà de quoi embraser la salle entière, tous âges confondus! Parmi les danseurs, nous apercevons Peter, qui a l'air de connaître les pas sur le bout des orteils!

La nuit tombe. Nous nous rendons chez Pierre. Une vraie "party de cuisine", comme ils disent ici, va avoir lieu. Comme son nom l'indique, la fête a lieu dans la cuisine, tradition héritée de leurs ancêtres qui n'avaient que peu de moyens pour se divertir. Nous retrouvons les soeurs MacDonald, invitées l'après-midi même par Peter à se joindre à Lewis, joueur de fiddle et également couchsurfer !

Et la party de cuisine, c'est aussi l'occasion de prendre des cours de danse folklorique :

samedi 2 juillet 2011

Canada day à Ottawa



Le 1er juillet est jour de fête nationale. J'ai pensé que la capitale, Ottawa, serait le meilleur endroit pour vivre cela. D'autant plus que le nouveau couple royal était attendu en visite officielle pour cette fin de semaine!!
Il est assez simple au Québec de trouver de quoi faire du covoiturage. J'ai donc effectué le voyage Montréal-Ottawa en voiture. Comme rien n'arrive au hasard, mon conducteur, Eric, a reçu une invitation officielle pour présenter devant Kate et William l'association pour laquelle il a été bénévole depuis 10 ans! Il m'a donné en avant-première une répétition de son discours :-)

Arrivé à Ottawa, il me dépose au Musée des civilisations que j'ai pris le temps de visiter pendant près de 5 heures. Oui, je sais je suis lent… Non, en fait, j'aime bien prendre mon temps :-) Le Musée est tellement grand, on pourrait y passer des jours entier! L'histoire du pays est racontée à travers des reconstitutions un peu cheap, mais cela permet de bien comprendre l'histoire des peuples autochtones et l'arrivée des européens.
Au passage, un petit extrait sonore d'une "mamie acadienne", juste pour l'accent (désole pour la mauvaise qualité du son...).

Mamie acadienne by arnaudbaudry

Mes hôtes à Ottawa étaient Austin et Sherwin. Austin travaille comme assistant d'un MP (Member of Parliament). Grâce à cela, j'ai eu la chance immense de voir les festivités d'un point de vue exceptionnel : en haut d'un immeuble officiel faisant face au Parlement! Près de 500.000 personnes étaient attendues pour participer aux animations, assister aux concerts gratuits et évidemment écouter le discours du Prince! Bon, je vous avoue que j'étais un peu loin pour le voir en vrai. Je l'ai vu à la télé, c'est pas si mal.
Le point de vue était également extraordinaire pour assister aux feux d'artifices donnés en cette journée de fierté nationale.
Nous avons terminé la soirée dans un club gay à ciel ouvert, encore une fois sur le toit d'un immeuble!! :-)

Pour finir, voici un court montage au petit goût british...