jeudi 15 septembre 2011

A bord du Canadien, on prend son temps

Dans le train, le temps n'est plus le même.

On est obligé de prendre son temps.
On prend le temps... De regarder par la fenêtre. D'admirer les paysages. De voir le temps changer. De ne pas voir le temps passer...

On attend aussi.
On attend - longtemps - que le train veuille bien redémarrer après un arrêt en gare.
On attend qu'un train de marchandises (encore un) long de 2 kilomètres veuille bien passer son chemin.

Et évidemment quatre jours de train, ça laisse le temps de penser. Penser à pourquoi je suis parti, ce que je fais ici, aux amis et à la famille laissés en France, aux 3 mois et demi de voyage que je viens de vivre, à ce qui m'attend maintenant...

Embarquez quelques minutes au rythme du Canadien et prenez votre temps...
(S'il vous plait, cliquez sur le bouton "HD" et visionnez en HD sur Vimeo, ça sera beaucoup mieux!)




Baladez-vous dans le train et écoutez les ambiances...

mardi 13 septembre 2011

Le "Canadien" : de Toronto à Vancouver en train



> Regardez les photos en plein écran!

Jeudi soir. La gare de Toronto est assez glauque. Ou c'est peut-être le fait d'être un peu triste de quitter cette ville qui me fait dire ça. Je me prépare à prendre le "Canadien", le fameux train qui traverse le pays d'est en ouest en quatre jours. Départ : Toronto, arrivée : Vancouver. Enfin pas tout à fait car je compte m'arrêter en chemin, à Edmonton. Je veux visiter l'Alberta pendant une semaine avant de reprendre le train à Jasper.

Le Canadien, c'est la ligne rouge ci-dessous.



J'enregistre mes bagages, tout comme on le fait dans un aéroport. J'emprunte un escalator pour accéder au quai d'embarquement. Le train est imposant et si long qu'on ne peut en apercevoir la fin! Bon, en même temps il fait noir… Je montre mon billet à un agent. "Tout droit, jusqu'à l'avant du train!" m'indique-t-il. Le quai est presque vide et très sombre. Le train va bientôt partir, je le sens. Le vrombissement des moteurs ajoute à la pression du temps. Je ne perds pas une seconde et marche à bonne allure jusqu'à ce qu'un second agent m'arrête dans ma lancée. On m'invite très gentiment à monter et on m'installe dans un fauteuil. Une voix annonce d'un air théâtral et complètement surjoué "Bon voyage à bord du Canadien!!!".

Bienvenue à bord du Canadien! by arnaudbaudry

Au fait, j'ai un fauteuil? Tiens, c'est bizarre, je pensais avoir réservé un lit. J'attends un peu pour voir ce qu'il se passe. On va peut-être on me faire signe.
Une employée de VIA Rail explique à des passagers assis près de l'évacuation de secours comment briser la vitre en cas d'urgence. Je suis ravi de profiter de ses explications rassurantes… Quelques passagers mangent un sandwich et sortent leur duvet. Ça devient inquiétant, vais-je vraiment devoir passer 3 jours sur un siège?
Je décide tout de même de me renseigner. Une employée constate l'erreur faite sur la place qui m'a été attribuée et m'invite à la suivre à l'autre bout du train! Un long parcours m'attend : ce sont vingt voitures de trente mètres de long à traverser dans un couloir suffisamment large pour ne pas permettre à deux nord américains de se croiser facilement.

J'arrive enfin à mon lit. Ouf! Je suis situé à seulement une voiture du "dôme", wagon panoramique où "on sert du Champagne actuellement" me dit-on. Le temps de poser mes affaires et le Champagne n'était plus. Mais il avait laissé des traces. Je rencontre quatre anglophones, deux couples d'une cinquantaine d'années, visiblement un peu éméchées. Les deux femmes aux joues rouges ne peuvent s'arrêter de rire. Elles me font penser à ma mère quand elle boit une gorgée d'apéritif. Peut-être est-ce une allergie à l'alcool? L'un des deux hommes s'excuse :
" - Désolé, nous sommes très bruyants. Vous êtes venu ici pour prendre un café tranquillement…
- Pas de problème, réponds-je, c'est un espace public. En fait, je me suis perdu dans le train et j'ai manqué le Champagne que vous venez probablement de boire.
- Oh, vous avez perdu votre Champagne? Je l'ai trouvé, je suis en train de le boire!"
Tout le monde : "Hahahahahahahahaha!!!!".
Le voyage s'annonce épique.

Ils finissent par aller se coucher. Je bois mon café et savoure un muffin au chocolat tout en faisant quelques photos. Vers minuit et demi je décide d'aller me coucher, le petit déjeuner est servi tôt le matin, je dois m'adapter au rythme.

Vendredi. Au matin, on me sert de délicieux pancakes aux bleuets, accompagnés d'un café évidemment à volonté, comme dans tout bon restaurant canadien. Une fille d'Edmonton partage ma table. Nous discutons un peu et je me rends compte qu'elle connait la soeur de mon hôte à Halifax! Incroyable, encore une fois je me fais la réflexion "Que le monde est petit"!!
Après avoir bien mangé, je fais un tour dans le wagon panoramique. Plusieurs personnes me voient prendre des photos et me demandent s'il pourraient en avoir une copie. Bien sûr que oui! Je leur donne l'adresse de mon blog :-)
[Note to the passengers I traveled with : you're welcome to let a comment if you see that post!]

Les canadiens sont très sociables, particulièrement dans l'atmosphère intime d'un train. Côtoyer les mêmes personnes pendant un voyage de plusieurs jours, ça rapproche. Je discute ici et là avec les passagers, je partage mes aventures. La population est principalement âgée, disons que la majorité a la soixantaine bien tassée. Il faut du temps et de l'argent pour effectuer ce type de voyage, ce dont les plus jeunes ne disposent pas forcément… J'ai l'impression de ne rien avoir à faire là. Je me sens à la fois privilégié et imposteur.

La journée se passe. Le soleil fait suite à la pluie. Les arbres et les cailloux quant à eux ne changent pas. Les paysages sont vraiment magnifiques et la lumière idéale. L'Ontario est la province la plus large à traverser. Je ne franchirai la frontière du Manitoba que le samedi vers 4:50 du matin.

Samedi. Vers 7:00, nous faisons une halte de quatre heures à Winnipeg. J'en profite pour trouver une connexion Internet (il était censé y en avoir dans le train mais ce n'est pas le cas) et envoyer quelques demandes de couchsurfing pour la semaine qui vient (je m'y prends un peu au dernier moment…).

Le trajet continue. Le Manitoba, le Saskatchewan et l'Alberta sont communément appelées les "Prairies". On comprend pourquoi quand on traverse des centaines de kilomètres de plaines dont les cultures et les étendues d'eau transforment le paysage en un tableau de jaune paille, vert chlorophylle et bleu ciel.
Ce sont aussi les trois provinces les plus conservatrices, réserves de cow-boys, farmers et puits pétroliers.

Le samedi soir, je prends mon dernier dîner en compagnie des trois personnes que j'ai maintenant l'habitude de rejoindre en voiture restaurant. C'est drôle de se retrouver comme ça midi et soir. Il y a Sophie d'Angleterre, Elisabeth de Toronto et Zoé d'Edmonton. Les discussions sont sympathiques. Nous sommes généralement les derniers à quitter le restaurant!
Les repas servis sont de bonne qualité. Ce n'est pas extraordinaire mais c'est correctement cuisiné, ce qui est la moindre des choses pour un voyage qui se veut première classe.

J'arrive le lendemain matin à Edmonton vers 6:30. Et je n'ai toujours pas de place où dormir…

* * *

Dimanche. Je reprends le train une semaine plus tard, depuis Jasper. C'est la dernière étape de mon voyage qui me conduira à ma destination finale : Vancouver.
Cette fois-ci je suis arrivé à temps pour le Champagne. J'ai trouvé ma cabine facilement, tel un habitué du "Canadien".

Le chemin de fer sillonne les Rocheuses. La voiture dôme est tout indiquée pour profiter de ces vues magnifiques sur les pics, les cascades et les forêts. La vitesse de croisière n'a pas beaucoup augmenté depuis la semaine dernière. Les arrêts sont nombreux pour laisser passer les trains de marchandises. Une seule voie a été construite sur la majorité du parcours. Des segments ont été arrangés pour permettre aux trains de se croiser. Mais quand l'un arrive en avance, il doit attendre l'autre…

Lundi. 9h42, j'arrive en gare "Pacific Central". Le nom me sonne comme le bout du monde. J'ai bien atteint la côte Ouest. Vancouver a les pieds dans le Pacifique et la tête dans les montagnes. Elle me tend les bras. Reste à moi de l'embrasser…

dimanche 11 septembre 2011

Entre plaines et montagnes, une semaine en Alberta

L'Alberta, un grand écart entre les Plaines de l'Est et les imposantes Rocheuses de l'Ouest. Je me suis donné une semaine pour découvrir certains points d'intérêt qui me tenaient à coeur : les hoodoos et les dinosaures à proximité de Drumheller et ses Badlands, la beauté des lacs de montagne non loin de Banff, et, sur la route pour Jasper, les glaciers de Columbia Icefields (avant qu'ils ne disparaissent...).


Agrandir le plan

Direction Drumheller, le pays des dinosaures
Au matin, Elliott (mon hôte à Edmonton) m'accompagne retirer ma voiture de location. Je prends la route vers le sud. Entre Edmonton et Drumheller, les plaines sont reines. On arrive en fin d'été mais la lumière reste intense et la chaleur écrasante. Je roule plusieurs centaines de kilomètres, traversant des champs à perte de vue sur des chemins plus ou moins asphaltés, rencontrant ça et là des ranchs, des lacs, du bétail, des pompes à pétrole (beaucoup)... L'Alberta constitue la deuxième réserve de pétrole mondiale après l'Arabie Saoudite. Autant dire que ce n'est pas vraiment la Province la plus écolo. L'économie de l'or noir est essentielle au développement de la Province, et du pays.

Au détour d'un virage, les plaines se transforment en un instant en un profond ravin. L'effet est saisissant. Cette cicatrice béante transperce l'Alberta de nord en sud. Nous sommes dans les Badlands. Le paysage semble lunaire, les roches agonisent à l'air libre, le climat est rude (-35° en hiver, +35° en été). Drumheller se vente être la "capitale mondiale des dinosaures". L'érosion provoquée à l'époque glaciaire a en effet creusé la roche pour laisser apparaitre des milliers de fossiles dont de nombreux restent encore à découvrir et à étudier. En suivant la route au nom marketé de "Dinosaur Trail", on arrive, au milieu d'un décor désertique, au Royal Tyrrell Museum of Paleontology qui affiche la plus grande collection de squelettes de dinosaures au monde. Entre fossiles et reconstitutions, la richesse du Musée vaut le détour.

Plus au sud, on peut admirer des "hoodoos", ces piliers de roche tendre façonnés par les éléments naturels, coiffés d'une couche de roche dure qui les protège d'une érosion trop rapide. Je suis presque seul sur le site. La nuit tombe. Je profite du spectacle et contemple la beauté de la nature.

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Des prairies aux montagnes
Je reprends la route en direction de Calgary, où je ne passe finalement que très peu de temps car la ville ne me semble pas d'un grand intérêt. Le soleil couchant découpe dans le ciel le relief de la chaîne montagneuse. J'ai hâte d'entrer dans les Rocheuses ! Je continue donc mon chemin jusqu'à Jasper où je trouve un petit coin tranquille pour dormir.

Au matin, je me promène sur le sentier Fenland. Je ne croise que quelques écureuils et quelques coureurs. C'est bon d'être seul, de prendre son temps, de respirer et écouter la nature. Je vide mon esprit des pensées anxiogènes, je me sens bien. Je suis content d'être ici, loin de tout, proche de moi-même.

À Banff, j'ai fait la rencontre de Sebastian, un chilien également inscrit sur couchsurfing.org. Il me fait découvrir les lacs environs, le fameux Lake Louise et son étonnant bleu turquoise, et le moins connu lac Minnewanka, à quelques minutes de route de Banff. Je pratique un peu mon espagnol que j'ai perdu depuis mon départ de Paris.

J'aime la tombée de la nuit. Le ciel s'habille de toutes les couleurs. J'observe les variations subtiles de couleur. Je suis subjugué par la beauté de la montagne.

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Sur la route des glaciers
Au petit matin, la lumière est douce, le calme règne tout autour de moi. La brume est toujours là par endroits. Je prends quelques photos en guise de petit déjeuner et continue mon chemin sur la "Promenade des glaciers". Les occasions sont nombreuses de s'arrêter et d'admirer la beauté des montagnes.

Après plusieurs heures, j'arrive au pied du glacier Columbia. En fait, la partie visible depuis la route s'appelle Athabasca Glacier, une langue de glace de six kilomètres de long et un de large. Un guide fait embarquer un groupe de touristes dans une énorme autoneige aux roues presque aussi hautes que moi. La montée s'effectue lentement, mais sûrement. Le guide prodigue des informations sur la formation et l'utilité des glaciers, et commente les formes géologiques qui nous entourent. C'est assez excitant de se dire que l'on va marcher sur l'un des plus gros glaciers en dehors du cercle Arctique ! Pour éviter tout risque de tomber dans une crevasse, le chemin est rebalisé chaque jour en fonction des mouvements de glace. Je pose un pied sur le glacier. J'ai l'impression d'accéder à un autre monde. L'air froid me mord le visage, quand le soleil me brûle la peau. Je marche un peu dans la zone autorisée et prends quelques photos. À mon retour, je poursuis ma découverte du glacier le long d'un sentier me conduisant le long des moraines (ces montagnes de pierres poussées par l'avancée du glacier) et à l'extrémité de la langue de glace. L'effet du réchauffement climatique est bien visible, chaque année le glacier se rétracte et son activité diminue...

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Jasper, dernière rando avant Vancouver
Je continue ma route vers Jasper. Après quelques nuits (froides) dans la voiture, je décide de trouver une auberge. La seule ayant encore des places n'a pas l'eau courante. Dommage, moi qui comptais me réchauffer avec une bonne douche. Mais bon, un vrai lit et un toit, c'est mieux que rien. J'y rencontre deux français, Léa et Julien, avec qui je vais faire une balade le long du Canyon Maligne. J'emprunte ensuite le tramway aérien pour escalader le mont Whistlers surplombant la ville de Jasper. Je m'offre une petite randonnée en altitude sur des roches dépourvues de végétation. Encore une fois, j'apprécie ce temps passé avec moi-même en connexion avec la nature. Je redescendant tranquillement, l'esprit reposé.

Je reprends le train depuis Jasper à 14h30, pour la dernière section de mon voyage.
Arrivée prévue à Vancouver : 9h42 le lendemain matin.

lundi 5 septembre 2011

Un jour à Edmonton



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Quelques heures avant d'arriver en gare d'Edmonton, je ne savais toujours pas où dormir le soir même. Le destin a placé sur ma route Zoé. Elle revient d'Angleterre où elle a effectué ses études en ethnologie, et a pris comme moi le train depuis Toronto, après une traversée de l'Atlantique en ferry (ça c'est quelque chose que j'aimerais faire!). Originaire d'Edmonton, elle a évidemment des connections et des amis là-bas. C'est le coeur sur la main qu'elle me propose d'en contacter quelques uns, m'assurant que l'un d'entre eux acceptera certainement de m'héberger pour une nuit!

Nous arrivons en gare d'Edmonton très tôt le dimanche matin. Le soleil venait tout juste de se lever. Sa chaleur et sa couleur orangée sont bien réconfortantes avec cette très courte nuit. Zoé vient de recevoir la confirmation de son ami. Sa mère me conduit très gentiment jusqu'à chez lui.

A peine réveillé, il m'accueille les bras ouverts. Mais il doit partir travailler dans la boulangerie dont il est co-propriétaire. Son amie Maggie m'invite à l'accompagner chez elle pour petit-déjeuner avec sa colocataire. J'accepte volontiers. Nous passons la matinée à discuter sur la terrasse ensoleillée. Jille (la coloc) me parle avec passion des deux années qu'elle a passées à Vancouver. J'ai hâte!

Je passe le reste de la journée à me balader dans la ville. Une journée m'a suffit. Edmonton n'a pas un intérêt immense, mis à part son Art Gallery. Et son fameux West Edmonton Hall, le plus grand centre commercial d'Amérique du Nord (dont je n'ai - malheureusement? - pas eu le temps d'aller lécher les vitrines).

Nous passons la soirée tous ensemble, Elliot, Maggie, Jille et des amis à eux. Ma journée à Edmonton se termine. Ce fût court, mais intense en rencontres riches et agréables!